Le paysage n’est pas une histoire de goûts et de couleurs. S’il est propre à son observateur, nombre de des perceptions et des représentations de ce dernier sont communes à un grand nombre de personnes. Cela est simplement lié au fait de connaissances et de pratiques partagées, d’une éducation et d’une culture communes à des groupes d’individus.
Le présent article donne à voir, à travers les propos des personnes interviewées, la construction intellectuelle des paysages ; attachée à une culture et des pratiques de paysages. Il souligne l’essence du paysage, émanant du rapport de l’homme au temps et à l’espace.
L’analyse des résultats de l’enquête par questionnaire auprès des Brétilliens (note) permet de généraliser et de mieux comprendre les paysages perçus par ces habitants en fonction de leur âge, leur capital socio-économique et culturel, leur lieu d’habitation et leur mobilité sur le territoire.
Le terme de paysage semble de prime abord flou. La plupart des acteurs interviewés questionnent cette notion ; soit parce qu’ils doutent de l’objet de l’entretien, soit par qu’ils s’inquiètent de la subjectivité de leur propos.
Aussi, tous insistent sur la particularité de leur regard sur les paysages de l’Ille-et-Vilaine, émanant de déterminants autres que la seule fonction qui nous amène à les interroger. Même les acteurs interrogés à titre professionnel considèrent que leur regard est, de ce fait, particulier au sein de leur profession. C’est en précisant notre intérêt à entendre leur propre regard sur les paysages du département qu’ils dévoilent les déterminants de ce regard et les composantes de leurs paysages. Certains notent parfois le caractère très personnel, voire intime de leur propos.
«C'est souvent un mélange de deux genres : de ce qui est existe devant vous, mais aussi de la manière dont vous le lisez cet habitat, entre guillemets, ou ce tableau. » Acteur environnementaliste
Une culture de paysages
Des histoires de paysages
Au-delà de leur fonction, les acteurs interviewés choisissent de parler des paysages qu’ils connaissent. « Je parle des paysages dont je me suis imprégné le plus. » Pays des Vallons de Vilaine Ils parlent de leur propre expérience d’environnements, particuliers par les sensations et les émotions qu’ils leur ont procuré, et les sentiments qu’ils y associent encore aujourd’hui. Ils se rappellent leur première découverte de ces lieux. Ce souvenir les ramène souvent à leur enfance, parfois à leur arrivée sur le territoire où ils habitent aujourd’hui.
« Je pensais à un chemin creux qui est derrière chez moi, aux étés où on allait à la chasse aux papillons, (…) il y a le soleil. Et puis ces chemins creux où il faisait frais. » Elu communautaire du Pays des Vallons de Vilaine
Plus qu’une nostalgie, ils considèrent que les paysages de l’enfance retiennent des lieux et des émotions qui ont façonné leur regard sur les paysages aujourd’hui et, plus profondément, qu’ils participent de leur construction en tant qu’individu. Plusieurs font part de l’incidence de ces émotions sur leur choix de vie ou de travail. Ils confèrent ainsi au paysage une composante identitaire forte.
« Mes racines, elles reposent sur deux choses en fait : sur le lien familial en priorité ; et le deuxième point c’est le paysage. Enfin le paysage, c’est l’environnement, là où j’habite en fait. » Acteur économique « Comme vous avez besoin de votre maison, je trouve que c’est le paysage qui va vous apaiser et qui va faire que vous allez avoir une identité, être de quelque part, et que vous allez avoir des racines. Et je pense que c’est ça qui donne aussi l’audace aux gens d’aller loin. » Elu communautaire du Pays de Rennes
Les paysages font référence à des images positives ; même lorsque les acteurs rencontrés s’inquiètent de la qualité paysagère de leur environnement actuel et à venir.
« Le paysage, pour moi, c’est l’équilibre. Quand vous êtes quelque part, c’est un équilibre, vous ne savez même pas l’expliquer. C’est comme regarder un tableau. (…) C’est la sensation que vous avez quand vous êtes dans un point donné et que vous regardez autour de vous. Moi, je suis très observateur. » Elu communautaire du Pays de Redon
Ils parlent de « beaux paysages », se réfèrent au vocabulaire pictural, interprètent leur composition en y mêlant une histoire. Un élu explique le caractère animé des paysages qui racontent l’histoire d’un lieu en même temps que sa propre histoire.
« La force du conte ou de la légende, c’est d’objectiver ce qui reste caché, dissimulé, une dimension cachée dans certains paysages. » Elu communautaire du Pays de Redon
« J’avais l’impression d’être en Amazonie, alors j’amenais ma petite machette pour me frayer un passage avec mon canoë en bois. Et toute mon enfance s’est passée comme ça, dans la nature, à essayer de récupérer des planches, des bidons, du fils de fer, pour en canoë ou en radeau, remonter la rivière, découvrir, me raconter des histoires, parce qu’il y a une force, un imaginaire, un imaginaire de la terre comme dirait Gaston Bachelard. » Elu communautaire du Pays de Redon
Le paysage est ainsi dépaysant. Il renvoie à d’autres paysages ; des paysages proches, d’autres lointains, en fonction de sa propre culture et de ses voyages.
« On doit pouvoir voyager avec des paysages. » Elu communautaire du Pays de Rennes
« Quand on est sur les Landes Blanches du Canut, on pourrait croire qu’on est sur le lac du Connemara, en Irlande, enfin ça rappelle un peu les tapis de bruyères, un ciel souvent de ces teintes bretonnes. Mais c’est un élément de l’identité aussi. » Elu communautaire du Pays des Vallons de Vilaine
« On a l’impression d‘arriver dans un village de montagne. » Elu communautaire du Pays de Brocéliande
Ainsi, les brétilliens comparent leur environnement aux paysages qu’ils ont connu ou parcouru ; dessinant, à partir de là, l’échelle et le contenu de leurs paysages du département aujourd’hui.
Plusieurs considèrent l’incidence des représentations culturelles des paysages sur le comportement dans un environnement. Certains constatent une culture globale qui conduit à la valorisation et à l’attractivité des paysages de la côte, au détriment, selon eux, du reste du territoire départemental. D’autres s’inquiètent d’un rapport de plus en plus visuel et virtuel à son environnement.
« (Suite au remplacement de la terre par du sable pour les plantations en bas d’un immeuble) Alors c’était marrant parce qu’il y a eu des réactions… en fait il y a des gamins qui se sont amusés à faire du rodéo, en fait comme s’ils étaient dans le désert, voilà. C’est drôle de voir qu’en fait un paysage, il fait aussi référence à des pratiques culturelles. » Acteur aménagement
Observant l’importance de leur culture sur leur représentation des paysages, des élus questionnent la transmission de cet héritage auprès des jeunes générations.
« Le problème dans une culture, c’est que quand vous avez une interruption d’une seule génération, vous perdez tout. Même les savoirs en entretien, le moindre commis de ferme savait faire ça, c’était son boulot, il savait mener des animaux, cultiver la terre, nourrir des gens, bricoler, il savait faire un mur en terre, jouer de la musique et raconter des contes, tout cela en étant soit disant inculte. (…) Ces gens là qui avaient la connaissance ont été balayés en une seule génération. » Acteur environnementaliste
Les acteurs rencontrés s’intéressent à la reconnaissance sociale d’une qualité environnementale. Plusieurs concluent qu’elle passe nécessairement par une culture des paysages.
La vallée de la Vilaine apparaît avec de grandes qualités pittoresques, au sens « digne d’être peint ». La rivière au centre est visible, le motif du pont y attire l’œil, et joue le rôle d’une « fabrique » (terme de peinture). Il y a une structure paysagère identifiable : les cultures et le bocage autour de la rivière, la forêt au sommet.
Des paysages distinguant des catégories de population
Les personnes rencontrées considèrent également leurs propres caractéristiques identitaires pour expliquer la particularité de leur regard sur les paysages de l’Ille-et-Vilaine. Ils évoquent leur origine ; paysanne ou bretonne pour la plupart. Elles parlent bien sûr de leurs domaines d’activités professionnelles, de leur fonction d’élu, mais aussi d’autres activités, ludiques, artistiques ou culturelles (promenades, peintures, photographies, lectures, formations, voyages …). Les artistes, professionnels ou amateurs, et les pêcheurs rencontrés se distinguent d’ailleurs de l’ensemble des personnes interviewées par la minutie de leur description des paysages, tant de l’environnement que de leur état.
« C’est une question de temps, ce n’est pas d’un coup, il faut voir passer les minutes. Avoir l’art de rester à ne rien faire. (…) Un coucher s’il y avait un peu de vent et tout ça, je voyais en même temps les nuages défiler, le soleil tomber, les couleurs qui changeaient au niveau du ciel. Et puis il y a la mer qui jouait un rôle aussi. » Elu communautaire du Pays de Saint-Malo
L’incidence des caractéristiques socio-économiques et culturelles sur le regard des Brétilliens sur les paysages de leur département est confirmée par l’analyse statistique. Considérant les paysages choisis et racontés par les habitants interrogés, les personnes ayant le plus faible capital socio-économique et culturel (les ouvriers) mettent en avant les forêts et les chemins, caractérisés l’importance de leurs composantes affectives et pratiques, liées à la facilité de leur accès. Celles qui ont un capital socio-économique et culturel le plus élevé retiennent plus que les autres les objets urbains et les représentations patrimoniales, privilégiant les composantes identitaires et appréciatives des paysages.
Parmi les différentes professions par catégorie socioprofessionnelle (PCS), les chefs d’exploitations se distinguent parce qu’ils parlent plus souvent que les autres du milieu rural, les employés, eux, considèrent, le littoral préservé, les professions intermédiaires, la campagne et le relief.
Des représentations sociales des paysages de l’Ille-et-Vilaine : des objets et représentations fonction du capital socio-économique et culturel (extrait de « une enquête par questionnaire auprès des habitants pour une étude des perceptions et représentations
Plusieurs interviewés concèdent que l’évolution des paysages est principalement le fait de leur propre évolution. La plupart des élus notent qu’ils sont aujourd’hui, avec l’âge (supérieur à la moyenne départementale), plus sensibles aux paysages. S’appuyant sur leur propre expérience, ils déduisent un regard sur les paysages différent selon les générations.
« J’ai appris à regarder. Ce que je n’avais pas fait pendant 50 ans, on passait à côté, à côté des choses que certains autres surement découvrent… (…) Parce que la beauté, on la découvre sur tout, la beauté. Ça dépend comment on voit. Je reviens toujours, ça s’apprend, c’est une question de patience. Quand on travaille, on va vite, en général on essaie, surtout aujourd’hui, on est plus ou moins stressé, on nous demande de plus en plus, on n’arrête pas. » Elu communautaire du Pays de Saint-Malo
Là encore, le lien entre l’âge et le paysage est conforté par l’analyse statistique des réponses des Brétilliens enquêtés. Plus que les autres, les plus jeunes se réfèrent aux paysages emblématiques, déjà reconnus, et les éléments patrimoniaux pour parler de paysages de l’Ille-et-Vilaine. Les plus âgés marquent un rapport affectif aux paysages qu’ils retiennent, qui renvoie à leurs pratiques et culture des paysages. Ils se distinguent par l’importance de l’eau dans leurs récits de paysages. Les 45 à 60 ans soulignent plus souvent le caractère rural des paysages qu’ils choisissent d’évoquer. Ils marquent la distinction entre le rural et l’urbain, déconsidérant ce dernier en tant que paysage.
Des représentations sociales des paysages de l’Ille-et-Vilaine : des composantes retenues fonction de l’âge (extrait de « une enquête par questionnaire auprès des habitants pour une étude des perceptions et représentations sociales des paysages de l’Ille-et-Vilaine » - septembre 2013)
Le paysage apparaît comme un rapport privilégié de l’individu à son environnement. Si les histoires qu’il raconte diffèrent selon les Brétilliens, elles renvoient à des représentations qui sont la plupart du temps communes à des groupes d’individus, a fortiori dans une société où la culture globale prend le pas sur la culture locale. Aussi, pour parler des paysages de l’Ille-et-Vilaine, les Brétilliens retiennent des composantes, des objets et des représentations qui les distinguent selon leur âge et de leur capital socio-économique et culturel.
Des pratiques de paysages
Les élus communautaires et les autres acteurs rencontrés associent également leur sensibilité au paysage à leurs pratiques actuelles. Ils reconnaissent bénéficier d’un cadre paysager qui nourrit cette sensibilité, et ce, quelque soit le lieu ou l’échelle de leur territoire de vie. Ils habitent, pour la plupart, en dehors d’une agglomération. Même ceux qui y vivent admettent avoir un grand espace et un voisinage privilégié pour apprécier leur paysage quotidien, déjà depuis leur fenêtre.
« L’attention qu’on porte au paysage, elle dépend aussi de la qualité du paysage que l’on a. Et comme on a un paysage qui est très fort, on a l’obligation de s’intéresser au paysage. » Acteur des collectivités
Les éléments de nature sont très proches et présents dans cet environnement : « au pied de chez moi », « sur la route, à côté de chez moi ». Quelques-uns choisissent aussi leur jardin pour parler de leur paysage de l’Ille-et-Vilaine ; ce paysage privé qu’ils ont construit.
« Je fais partie des gens qui aiment la nature. J’aime m’occuper de mes fleurs, de mes plantes. J’ai un grand jardin, dont j’aime m’occuper quand j’ai le temps. Ça fait partie de ma façon de me ressourcer. Quand je suis devant mes fleurs, ça me permet de m’évader et de déstresser. (…) c’est un paysage ordonné, je le fais, je plante mes arbustes, j’organise mon espace pour pouvoir en profiter au maximum l’année, avoir des choses au printemps, en été, à l’automne. C’est mon cocoon, c’est différent. C’est comme on décore sa maison. Mon espace extérieur, c’est ma décoration, c’est pour moi. » Elu communautaire du Pays de Vitré
Leur travail les conduit à une sensibilité particulière aux paysages ; directement lorsque leur métier (agriculteur, urbaniste, architecte, aménageur, botaniste, naturaliste, hydraulicien, professeur, …) les amène à réfléchir ou à agir sur un environnement ; indirectement dans les déplacements qu’ils effectuent, quotidiennement ou périodiquement. « (…) il y a des matins, c ‘est fabuleux d’aller au travail ; d’avoir ce moment de voiture, sur un paysage relativement ouvert. Au bout d’une journée, c’est aussi de pouvoir bénéficier de ce paysage là, matin et soir, dans une vie professionnelle. » Elu communautaire du Pays de Rennes
Les réponses des Brétilliens au questionnaire sur les regards d’habitants sur les paysages de l’Ille-et-Vilaine confortent l’incidence du lieu de résidence et des manières d’habiter le territoire sur la lecture des paysages , et en particulier des paysages de nature.
Des représentations sociales des paysages de l’Ille-et-Vilaine : des objets et représentations fonction des manières d’habiter (extrait de « une enquête par questionnaire auprès des habitants pour une étude des perceptions et représentations sociales des paysages de l’Ille-et-Vilaine » - septembre 2013)
Le paysage participe des sens. La vue semble le plus mobilisé dans sa lecture ; les acteurs rencontrés décrivent ce qu’ils voient. Ils reconnaissent qu’il est difficile de parler de paysages à travers les autres sens, mais lorsqu’ils se réfèrent à leurs expériences de paysages, le toucher, l’ouïe et l’odorat interviennent également.
« Il n’y a pas que le visuel, il y a les odeurs, il y a le toucher. Hein, quand vous passez votre main sur... c’est pas pareil si vous la passez sur un arbre ou sur un poteau en bêton. (…) Je n’ai pas les mots ni les compétences pour être capable de le décrire. » Elu communautaire du Pays de Fougères « Quand j’étais gamin, j’étais tout le temps rendu dans les chemins, j’adorais. (…) On n’oubliera pas quelque chose qui nous a ému ; la beauté. (…) La chaleur, cette sensation de bêtes qui grouillent un peu partout et cette odeur de bruyère de pin… (…) C’est les couleurs, c’est la vie quoi ça grouille de vie et c’est beau tout simplement. » Acteur environnementaliste
Le rapport du corps à l’environnement apparaît important dans la définition du paysage. Ainsi, plusieurs personnes parlent de bien-être et du paysage comme un besoin physiologique. Le cheminement à pied semble une activité privilégiée pour en bénéficier, il donne à observer le paysage dans sa proximité physique et sa variété.
« C’est en randonnant qu’on découvre le mieux le paysage » Elu communautaire du Pays de Fougères « La marche, je dirais que c’est la façon la plus sensible, parce qu’on peut s’arrêter, on a un rapport au temps qui est pour moi presque une donnée hyper importante dans la relation au paysage. » Acteur culturel
Plusieurs parlent aussi de contemplation. La pratique des paysages suppose une certaine disponibilité et patience dans un quotidien pressé, où on doit aller vite, où on est stressé, où l’on côtoie du monde. Elle est associée à des moments privilégiés de calme, de retrait, de repos. « Il faut avoir l’art de rester à ne rien faire » Elu communautaire du Pays de Saint-Malo
Si les personnes interviewées se placent comme sujet dans la description des paysages qu’ils évoquent, certains associent à leurs pratiques des paysages, leurs proches. En famille, ils parlent du partage et de la transmission à travers la pratique ensemble des paysages. La transmission du sens que l’on donne à son environnement passe par une relation, invitant dans la même expérience physique à en découvrir un détail.
« Le paysage des Corbinières, c'est de très beaux paysages. Vous avez la rivière, c'est vallonné, vous avez des collines et vous avez la forêt, un petit peu de … (…) c'est peut-être la nostalgie de ce paysage aussi, parce que quand j'étais enfant, j'allais avec mon grand-père pécher juste à côté. Et puis, par hasard, pas hier, avant-hier, j'y étais. » Elu communautaire du Pays des Valons de Vilaine
Le rapport du corps à l’espace est inhérent à la construction du paysage. L’enfance semble désinhiber les sensations corporelles dans la révélation de ces paysages. Elles sont des souvenirs importants pour les acteurs rencontrés qui tiennent à les transmettre à leurs proches. Sinon, ils parlent plutôt de leur état d’esprit dans ces cadres paysagers ; peut-être par pudeur.
Le paysage, dans un rapport au temps et à l’espace
Au-delà d’un cadre spatial, et même si la qualité de leur environnement offre une proximité des paysages au quotidien, la plupart des enquêtés associent le paysage à des moments particuliers ; des moments où l’on est disponible pour « profiter » du paysage. Ceux qui racontent des paysages dans leurs pratiques quotidiennes répétitives (de travail ou, plus souvent, de trajets domicile-travail) s’émeuvent des détails de leur évolution, qui rendent compte de leur temporalité. Ces détails sont renvoyés par les éléments de nature qui composent le paysage.
« Tous les matins, moi quand je rentre chez moi je vois un paysage différent si vous voulez : les arbres en fleurs, les feuilles qui tombent… » Acteur culturel
Les actifs décrivent très souvent des paysages du matin ; du soir aussi. Ils parlent du caractère agréable de cette observation alors qu’ils se rendent ou rentrent de leur travail. La plupart des acteurs racontent comme ils se sont surpris de tant s’attarder à la découverte d’un paysage, ou à en prendre soin (évoquant là essentiellement le jardinage). L’acteur culturel remarque combien les paysages imposent leur rythme, leur temporalité.
« L’environnement, entre guillemets, dicte un peu le rapport à la durée (…) On peut sentir ça aussi, je suis même sûr, dans des espaces urbains. Des lieux imposent leur temps en fait, un peu de leur durée, ouais une forme de régime de vitesse, un peu comme ça. » Acteur culturel
Les saisons sont importantes ; le printemps et l’automne sont souvent les préférées parce qu’elles mettent en scène la transformation des couleurs de la végétation, et donc celles du paysage. Plusieurs personnes racontent les verts, les jaunes, les rouges. L’alternance des couleurs du ciel est aussi importante. Des ciels gris, la pluie, la brume découlent des ambiances qui participent autant des paysages du département, que les ciels bleus et le soleil. Les éclairages nocturnes est moins évoqué, et jouent aussi des ambiances. Le rapport au temps présent s’appuie essentiellement sur les éléments de nature du paysage. Si le bâti ancien monumental renvoie à l’histoire de la Bretagne, les personnes rencontrées parlent autant des éléments de nature pour raconter l’histoire des lieux. Si l’appréciation des paysages est influencée par sa propre histoire et de ses propres expériences, plusieurs élus soulignent qu’elle dépend de la qualité de son environnement. Aussi, la sensibilité au paysage varie aussi en fonction de l’environnement de son habitat. Cette qualité est importante parce qu’elle est indispensable à la pérennisation des paysages, à la continuité de l’épanouissement des individus dans leur environnement. Le cadre paysager de la demeure est un déterminant important du choix du lieu de résidence, même si le coût du logement et la proximité des services restent les principaux critères de ce choix. Aussi, une partie de la population n’est pas en mesure de s’inquiéter du critère paysager dans leur choix de résidence.
« Le lieu de travail, vous ne le choisissez pas toujours, mais une fois défini, le lieu de vie, d’hébergement (…) Je reste persuadé, ce n’est pas le seul, mais l’environnement naturel d’une commune avec ses paysages fait partie des arguments qui peuvent inciter une personne à choisir un lieu d’habitation plutôt qu’un autre. » Elu communautaire du Pays de Rennes
La concentration humaine et la rentabilisation économique laissent aujourd’hui moins de place aux préoccupations paysagères. Elles créent des tensions dans le rapport à notre environnement, qui s’illustrent notamment par des tensions de voisinage. « Tout le monde n’a pas le même souci de l’environnement de son habitat » Elu communautaire du Pays de Rennes
Si les élus communautaires Brétilliens, en tant qu’habitant racontent des paysages proches, ils reconnaissent que tout ce qui les entoure ne fait pas paysage.