Les paysages ruraux bocagers sont les plus représentés en surface, ils couvrent la majeure partie du territoire départemental. Paradoxalement, ces paysages sont aussi les moins bien « représentés » sur le plan des images artistiques ou touristiques.
Le bocage
Le bocage en est la principale caractéristique : il n’existe pas d’endroit où l’on ne voit ni haie bocagère, ni arbre.
Les caractéristiques du bocage génèrent des modalités de perception spécifiques. La maille bocagère est très inégale, fait l’objet de variations très importantes. Les secteurs présentent des mailles plus ou moins serrées, mais certaines variations peuvent se produire à des échelles très réduites.
Ce paysage est très récent : les effets du remembrement et de l’évolution des pratiques agricoles pendant la deuxième moitié du XXe siècle ont été considérables. Cependant, il est difficile de se représenter le paysage avant ces transformations, faute d’images à hauteur d’homme, et la « modernité » de ces paysages ne semble pas réellement constituer son caractère perçu.
Une maille bocagère qui se répète et qui change
La présence du bocage (le réseau des haies, mais aussi les bois et les bosquets) sur tout le territoire intérieur donne une tonalité de paysages arborés, verdoyants, que l’on peut aussi qualifier de « bucoliques ».
Du fait du bocage qui instaure de nombreux écrans visuels, la perception du territoire est morcelée en petites unités, et ne présente que plus rarement de grands dégagements. De temps en temps, quelques positions de rebord offrent des vues plus vastes, mais dans l’ensemble, le paysage est perçu à l’échelle du « cadre de vie au quotidien », agréable et proche, sans grands effets spectaculaires.
L’alternance continuelle des haies et des parcelles détermine un paysage d’ombres et de lumières, et que l’on goûte à l’occasion des déplacements. La forme des arbres imprime un caractère singulier, notamment la figure iconique et parfois controversée de la ragosse.
Le gradient de la maille bocagère est étendu, et les variations peuvent se ressentir à une échelle très réduite, de l’ordre de la commune ou même de l’exploitation.
Des motifs d’eau, de forêt et de bâti répartis dans le bocage
De nombreux plans d’eau animent les territoires d’Ille-et-Vilaine, principalement des étangs et des retenues de rivières. Le réseau bocager est également marqué par la dispersion des éléments bâtis : traditionnellement, les fermes et les hameaux sont répartis dans le territoire, il s’y ajoute les bâtiments de l’élevage et de l’agro-alimentaire, ainsi que les pavillons du « mitage ».
Le terme de « paysage rural » n’exclut pas les localités, petites villes et bourgs qui ponctuent le territoire ainsi désigné. Certains villages apparaissent au sein du bocage dans des scènes dont la grande qualité paysagère est d’associer les composantes agro-naturelles aux éléments bâtis.
Le bocage apparaît, grâce au relief en creux de la vallée, sur le flanc bien éclairé, sous diverses formes : les haies d’arbres et d’arbustes, les arbres sans arbustes. Au sommet, les bois ferment l’horizon. Fermes et bâtiments se dispersent dans le maillage.
Un territoire rural très « moderne », aux dimensions paysagères fragiles
Une certaine idée de « permanence », portée par l’image d’un paysage rural ancien, est ressentie du fait de la présence du bocage, tout particulièrement celle des arbres adultes. Mais on peut aussi voir que les arbres sont vieux et peu renouvelés.
Cette idée de permanence est mise en cause quand on sait les bouleversements considérables opérés après 1950 :
L’agriculture modernisée a apporté dans le territoire de nouveaux motifs. Ils peuvent trouver leur place dans le paysage, dans un rôle de « fabrique », et à condition de ne pas chercher à se dissimuler derrière de lourdes haies de conifères.
Il n’y a pas de représentation de l’état de ces campagnes avant ces bouleversements : la photo aérienne en est le principal témoignage, et ne donne pas la perception du paysage. La modernisation elle-même n’a pas été accompagnée par un projet de paysage, on ne trouve aucune image de l’apparence des campagnes telle qu’elle aurait pu être souhaitée à cette occasion. Elle reflète pourtant une réalité économique : l’Ille-et-Vilaine est un des premiers départements agricoles du pays (premier rang pour le lait et les veaux, deuxième pôle national d’enseignement agricole…).
La destruction du bocage lors des remembrements a causé des dégâts (ravinement des terres, ruissellements et inondations, assèchements par le vent, pertes de biodiversité…). Des reconstitutions sont encouragées, portées par des raisons fonctionnelles (ravinement, ruissellement, biodiversité), et dans une perspective d’exploitation du bois énergie. Ces initiatives ne sont pas non plus portées par une réelle représentation de « paysage souhaité », mais il s’est créé une représentation de « patrimoine » à ce sujet, et le bocage est associé à l’identité des terres de l’Ouest.
A l’occasion des remembrements, les vergers ont fait l’objet d’une campagne radicale d’arrachage, mais cette transformation profonde n’est pas lisible dans le paysage, d’autant que les représentations manquent sur l’état initial.
Le contraste est saisissant entre les deux photos. En 1950, une mosaïque de parcelles closes de haies et plantées de vergers, fait place de nos jours à un presque openfield, remembré et débarrassé de ses vergers.
Les variations des formes du relief
La variation de la maille bocagère permet difficilement de distinguer des unités paysagères sur ce seul critère. Les reliefs et leurs formes jouent un rôle important dans les perceptions : les formes plus plates offrent moins de dégagement, les flancs au contraire permettent des perceptions plus amples.
Les secteurs boisés
Au sein des paysages ruraux, deux secteurs sont distingués non seulement par leur relief, mais aussi en raison de la couverture boisée plus forte. Il s’agit des collines de Saint-Aubin-d’Aubigné et du massif de Paimpont-Brocéliande.