Le patrimoine « qui fait » ou participe au paysage des bourgs et des villes est divers. Ce sont des châteaux se détachant de la ligne de crêtes et de leur ville close attenante, des villes comme Fougères ou Rennes, autre ville close d’où émergent des tours comme celle des Horizons. C’est aussi une somme d’architectures modestes qui font front et composent plus de 300 bourgs, une rue, une place ou un hameau, une friche industrielle sur la rive d’un ruisseau chargée de pittoresque ou de pathétique, un alignement de moulins à vent, un clocher d’église, une perspective sur des écluses, les quais d’un port ou encore la digue de la Duchesse Anne... Enfin, le centre bourg de Bruz, celui du Rheu, le nouveau Saint-Jacques-de-la-Lande relèvent aussi du vocabulaire patrimonial qui crée des paysages.
Fougères, vue sur la ville haute

La construction progressive de la ville close propose des épannelages, des hauteurs, des matériaux et des textures participant à la constitution d’un paysage caractérisant la ville. Cet assemblage produit un paysage qui fait patrimoine.

Les émergences patrimoniales qui inscrivent villes et bourgs dans le paysage

Talensac et Montautour (de gauche à droite)
Grand Fougeray et Saint-Malo-de-Phily (de gauche à droite)

L’église de Talensac, celle de Montautour ou de Saint-Malo-de-Phily, tout comme la Tour Duguesclin du Grand-Fougeray émergent de la ligne de crête comme pourraient le faire aussi un château d’eau ou une éolienne. A la différence de ces deux motifs contemporains, ces très nombreuses églises et leurs clochers qui percent les masses boisées, cette tour, sont des motifs paysagers que l’on peut associer à des représentations culturelles partagées, des « cartes postales mentales ». D’autant que ces églises sont perçues aussi comme le symbole d’un bourg ou d’une ville, d’une histoire de clochers ou de frontière, et créent l’effet de « signal » et de repère qui augmente la lisibilité du paysage. Le maintien de ces émergences en position dominante et surtout isolée est un enjeu de paysage surtout si d’autres objets leur font concurrence.

Saint-Domineuc

La concurrence d’un volume bâti trop haut ou trop présent, d’une éolienne mal placée, peut rompre un fragile équilibre. Cet axe de vue dans un parcours dynamique démontre la complexité de l’appréciation des éléments du programme. Il pose aussi la question de la nécessité d’identifier des perspectives à préserver.

Bassin de Rennes, vue depuis la RN 137

Les vues panoramiques que permettent les rebords du bassin de Rennes donnent l’image d’une ville plane, circonscrite aux limites d’une clairière. De la masse boisée et du mince ruban gris figurant la ville et son vélum bas, émergent des tours blanches qui font le paysage de la ville et lui donnent une échelle de ville capitale.

La ville close

Bécherel et Vitré (de gauche à droite)
Combourg et Saint-Malo (de gauche à droite)
Rennes

Le motif de la ville close est très présent en Ille-et-Vilaine (Hédé, Bécherel, Rennes, Redon, Fougères, Saint-Malo, Dol-de-Bretagne, Châteauneuf-d’Ille-et-Vilaine, la Guerche-de-Bretagne, Combourg, Vitré, Chateaubourg, Montfort-sur-Meu et Châteaugiron). Il renvoie à l’histoire tourmentée de la Bretagne, à la position de Marches. La ville close est un paysage à plusieurs échelles qui s’inscrit à la fois dans un paysage lointain et propose des paysages intérieurs. Dense et hermétique, le principe de fortification est mis en œuvre sous formes de murs d’enceinte ou de constructions contiguës créant un effet de parois très puissant. Après la suppression de l’enceinte comme à Dol, la fortification demeure présente au travers de son tracé et de sa densité bâtie. La densité bâtie accentuée par la courbure des rues, les perspectives fermées d’un univers très minéral construisent un paysage spécifique.

Rennes, ZAC de la Courrouze et le quartier des Chalais/Bréquigny

Ceinte de hauts talus plantés, sans banlieue, Rennes est à sa façon une ville close. A ce titre, l’architecture de l’immeuble sur voie de la ZAC de la Courrouze, affirme cette identité. Rennes est par ailleurs une ville historiquement close par trois enceintes dont ne reste qu’un fragment mais dont la trace subsiste dans le tracé des rues.

Le paysage intérieur des centres urbains

La minéralité du centre urbain, la diversité des fonctions, les enseignes, les perspectives fermées, les fronts bâtis font les caractères du paysage des bourgs. S’y ajoute une forte personnalité territoriale induite par l’utilisation de matériaux locaux et par des bâtiments souvent identifiables. Ce paysage est le vecteur d’une identité communale.

Saint-Brice-en-Coglès, Renac et Saint-Etienne-en-Coglès - Paysages identitaires et identifiables des centres-bourgs.
La Chapelle-Thouarault, Saint-Just et Talensac (de gauche à droite) - Paysages banalisés des lotissements : ici ou ailleurs.
Le Rheu, Pacé et Acigné (de gauche à droite) - Paysage des ZAC, une identité affirmée notamment par le parti paysager.

Les espaces produits ces quarante dernières années proposent l’image de la banalité. S’il est possible dans bien des cas de reconnaître un centre bourg ancien, l’est-il autant pour ces lotissements des années 1970, 1980 et 2000 ? A l’inverse, les ZAC proposent des tissus urbains avec de vraies identités. Il est difficile de dire si elles s’appuient sur celle du bourg ou de la commune. Pour autant, leur caractère produit un paysage urbain spécifique.

Maxent - A l’image de Maxent, les centres bourgs dont les constructions ne sont pas enduites présentent un caractère plus fort. Par exemple ici, l’église présente une similitude de tonalités et de matériaux avec les constructions qui composent le bourg.

Source : Google street view

Il est à noter que l’Ille-et-Vilaine possède un panel d’églises de grande qualité présentant de vraies personnalités qui influent sur la caractérisation du paysage du centre bourg. Celle de Maxent, ci-dessus, en est un exemple.

Saint-Etienne-en-Coglès, Saint-Aubin-du-Cormier et Tinténiac (de gauche à droite) - Au même titre que l’église dans d’autres bourgs, Saint-Aubin-du-Cormier illustre l’importance des rares beffrois dans la qualification du paysage de bourg ou ville.
Combourg

La présence de commerces est une des caractéristiques du bourg. Même si le réflexe se perd, on cherche encore la boulangerie ou le café près de l’église. Aujourd’hui, dans un contexte de déclin et d’abandon, leur présence est un signe tangible de dynamisme démographique, un argument qui permet aux élus de « vendre » leur bourg.

Bruz, Le Rheu, Saint-Jacques-de-la-Lande

En se développant fortement, les villes et les bourgs ont accolé aux centres anciens des modèles dissonants. Le lotissement pavillonnaire qui a été implanté à côté du bourg rural fait désormais partie, dans le langage usuel, du « bourg », qui désigne le centre ancien et ses développements récents. Certaines communes ont remis en cause ce modèle. Le résultat vaut patrimoine, tant pour le paysage proposé que pour la démarche qui a précédé le projet.

Bruz, Saint-Jacques-de-la-Lande et Le Rheu (de gauche à droite)

Ces communes de l’agglomération rennaise proposent des développements urbains singuliers influencés par l’identité urbaine du bourg. La démarche d’insertion des nouveaux tissus urbains dans son environnement a été intégrée dans la conception et la structuration paysagère du projet.

Bourgs, villages et hameaux de caractère

Saint-Suliac
Mont-Dol

Saint-Suliac, Saint-Senoux, le Mont-Dol…, certaines communes, par leur position sur des coteaux, leurs dimensions et leur unité qui permettent de les embrasser d’un regard et qui ne sont pas affectés par des d’architectures dissonantes, prennent valeur de paysage patrimonial. Il en va de même de certains hameaux très typés, comme ceux de Cancaval ou la Rue à Pleurtuit, qui présentent une identité claire de rue ou de grappe, sans que des constructions hors propos ne viennent faire ressurgir l’idée de mitage et donc de dépréciation.

Le paysage d’activités des rives de cours d’eau

L’eau dans le cadre de différents motifs, défensif, économique, esthétique, est une composante importante du paysage des villes et des bourgs. Combourg et son étang en sont un exemple. Au-delà des étangs qui créent des paysages très ouverts qui fédèrent les éléments autour d’eux, il y a le paysage industriel des bourgs ou des villes qui se découvre à l’occasion d’une porte cochère, d’un pont. Là, est conservée la trace d’un passé laborieux, industriel, artisanal de moulins à foulon, de lavoirs, de séchoirs, de moulins à farine ou papier.

Rennes et Bourg-des-Comptes - Rennes, prairie Saint-Martin Rennes, lavoir double en bordure de l’Ille, aux abords de l’école d’architecture Bourg-des-Comptes, bord de Vilaine.

Les quais

Qu’ils soient littoraux ou fluviaux, les quais relèvent du patrimoine urbain. Ce sont à la fois des motifs de berges construites, mais aussi de remarquables articulations paysagères unissant les façades aux plans d’eau qu’ils soulignent et rendent accessibles.

Halage et quai de Redon

Halage de Redon : Sans être un quai, des palplanches limitent le canal, l’immeuble s’implante sur son long. La rue isole la construction du canal sans créer d’espace commun.
Quai de Redon : Les quais offrent un paysage tout autre, maçonné, architecturé. La voiture y a élu domicile. Les quais de Redon illustrent la singularité urbaine de chaque rive avec les immeubles d’armateurs ouverts sur la Vilaine et le paysage plus industriel des rives du canal.

Rennes et Guipry - Au quai est souvent associé une écluse, parfois un moulin, une retenue d’eau qui dynamisent le paysage. Ce sont aujourd’hui des lieux prisés de promenades.
Saint-Malo - Port de pêche, de commerces, de plaisance, à sec ou en eau, les ports ont leurs quais, comme le marais de Dol a sa digue, ou la citadelle son mur d’enceinte.