Des reliefs originaux, des perspectives offertes par un bassin ouvert, des ambiances variées liées notamment à la présence des marais, des vues depuis les rebords… : la vallée du Couesnon est un paysage aux nombreuses qualités, mais qui ne se perçoit qu’en pointillés.
Cette photo considérée comme représentative des paysages d’Ille et Vilaine (voir l’enquête sociologique de l’atlas des paysages), a été prise au bord de la vallée du Couesnon au sud de Tremblay. La forme de la vallée détermine un « bassin visuel » où s’exprime une campagne bocagère très rythmée par la succession des haies. La lisibilité du paysage tient également à leur transparence permettant une vue en plans successifs.
Limites et voisinages
Il s’agit d’une séquence de la vallée comprise entre les massifs du Coglais à l’est, et ceux de Saint-Pierre-de-Plesguen et Saint-Aubin-d’Aubigné à l’ouest. Au sud-est, en amont, après avoir coulé dans le bassin de Fougères, la limite est doublement dessinée par le changement de forme de la vallée du Couesnon qui s’enfonce assez profondément dans le plateau granitique du Coglais, et par le passage sur le seuil de l’A84. Au nord, en aval, la limite est matérialisée par la RN 175 au nord de Pontorson, à hauteur du massif de Saint-Broladre. A l’aval de ce point, la vallée du Couesnon s’élargit et se fond dans l’unité des Marais de Dol. Si les limites sont particulièrement lisibles en amont et en aval de l’unité, le passage est souvent plus progressif et complexe vers les autres unités qui la bordent. De Saint-Marc-sur-Couesnon à Vieux-Vy-sur-Couesnon, la vallée étroite traverse un paysage homogène qui évolue progressivement vers le Coglais d’une part, et vers les Collines de Saint-Aubin-d’Aubigné d’autre part. Au sortir de ce massif, la vallée s’étale et se rattache sans rupture au Bassin de Combourg, à l’ouest, et à ses prolongements vers l’est. De Tremblay à Antrain, la limite redevient plus nette en rive gauche dominée par le plateau de Saint-Pierre-de-Plesguen, alors qu’en rive droite la retombée du Coglais est bien plus progressive, et compliquée par la présence de plusieurs affluents. Enfin la vallée s’élargit à nouveau dans la traversée du Bassin de Pleine-Fougères et de l’Avranchin qui le prolonge à l’est. L’unité n’est pas entièrement en Ille-et-Vilaine : à partir d’Antrain, le fleuve constitue la frontière entre la Bretagne et la Normandie.
Socle naturel
Le fleuve lui-même, les marais qui occupent le fond de sa vallée et les reliefs qui la bordent sont les principales composantes naturelles de l’unité. Le paysage repose sur l’alternance de deux phénomènes géomorphologiques : - La traversée par le Couesnon des massifs granitiques (Coglais) ou le passage à proximité (plateaux de Saint-Pierre de Plesguen, de Saint-Broladre) avec des versants assez nets ; - La traversée des bas plateaux schisteux (bassins de Combourg et de Pleine-fougères) aux formes plus évasées et où apparaissent des fonds plats alluviaux, de plus en plus importants lorsqu’on s’approche de la baie. Quelques particularités complètent ce schéma, comme la butte de Tremblay, pointement granitique analogue à ceux du mont Saint-Michel ou du Mont Dol, certains sites de confluences originaux comme à Antrain. Le cours du Couesnon s’oriente sud-nord, et offre de très bonnes conditions d’éclairement.
Motifs et structures du paysage
Une perception morcelée
La vallée ne peut pas être perçue dans sa continuité : les routes l’empruntent un moment, puis la quittent, ou la traversent. Elle est certes accessible par des chemins de randonnée, mais là aussi seulement par séquences. Les points de vue les plus notables sont ainsi les franchissements par le réseau routier et les « rebords », ces derniers offrant, en aval, de larges panoramas sur la baie du Mont-Saint-Michel.
Des séquences différenciées
Deux structures paysagères définissent les séquences principales de la vallée. En amont, de Saint-Jean à Romazy, la vallée est encaissée et boisée. Elle offre quelques points de vue mais reste assez intime, accessible seulement ponctuellement comme au site d’escalade de Mézières-sur-Couesnon. Quelques sites de carrières, en activité ou non, ponctuent le cours des vallées du Couesnon et de ses affluents, comme la carrière de Guémorin à Vieux-Vy.
Les cultures et les prés, ponctués de bâtiments agricoles, ouvrent l’espace et apportent de la lumière au paysage marqué par les nombreux boisements. Ceux-ci ne permettent pas de voir la rivière, mais aident à en situer le cours.
Le moulin offre un épisode de perception proche de la rivière. La scène « pittoresque » du moulin s’accompagne des équipements plus modernes du site liés à l’activité de production d’aliments pour le bétail qu’il accueille.
Entre Romazy à Pontorson, en aval, le fond de vallée s’évase, laissant place à des espaces de cultures, à des marais et à des peupleraies. Le fond de vallée est épaulé par les rebords des massifs voisins, aux boisements fréquents sur les pentes fortes. Dans les fonds, les marais constituent des motifs singuliers, exprimant un degré important de « nature ». Ils y côtoient les cultures qui contribuent par leur dégagement à la lisibilité de la vallée, et des peupleraies qui tendent au contraire à refermer l’espace et, parfois, à « écraser » l’échelle des reliefs. Ces fonds sont associés à la richesse environnementale, mais aussi à l’histoire de produits locaux tels que les oies de Sougéal qui bénéficient de la bonne qualité nutritive des prairies humides des fonds de vallée. Après Antrain, le fond s’évase graduellement jusqu’à Pontorson où, après la RN 175, la vallée se confond avec les polders qui en ont remodelé l’estuaire.
L’eau des marais est visible, mais pas celle de la rivière. L’ambiance du fond de vallée est qualifiée par le marais mais les peupliers cachent le Couesnon et cloisonnent le paysage en séparant le fond de ses versants.
Une maille bocagère graduée
Cette unité est marquée par un gradient croissant de densité de haies, allant du nord vers le sud. Bien que l’ensemble du territoire de l’unité ait fait l’objet de remembrements, la densité de haies reste plus importante au sud. Ce constat est éclairé par la pédologie. En effet, dans la moitié nord de la vallée, les sols, en dehors des terrasses alluviales, issus de schistes gréseux ou de cornéennes, sont profonds et permettent des labours. Le bocage à ragosses tend alors facilement à disparaître au profit des pratiques culturales intensives plus immédiatement avantageuses. Le bocage laisse donc place aujourd’hui à de grandes parcelles qui offrent des dégagements visuels importants. La moitié sud, quant à elle, présente un bocage plus traditionnel, où l’on retrouve une dominance de prairies et de zones agricoles hétérogènes. Sur les versants du Coglais, le sous-sol granitique a produit des sols plus pauvres qui ont favorisé le maintien de prairies et d’un bocage plus dense. La morphologie agraire se compose de petites parcelles bordées d’une maille bocagère. Les bosquets confèrent une ambiance boisée à l’unité.
Composantes urbaines et bâties
Dans le fond de la vallée, en partie inondable, le bâti est surtout représenté par des moulins et quelques sites d’activité à proximité des ponts. Pontorson, située dans la vallée au contact de la baie (hors Ille-et-Vilaine), occupe un site légèrement surélevé et contribue à séparer le Couesnon et la baie.
Des bourgs situés sur les versants ou les rebords de plateaux
On ne trouve pas de bourgs en fond de vallée. Ils sont situés de manière privilégiée sur les versants ou les rebords : Vieux-Vy-sur-Couesnon, Brais, Romazy, Rimou, Sougéal, se succèdent ainsi le long du cours et dominent le fond de vallée. On ne trouve cependant pas de situations remarquables (belvédères ou berges aménagées) mettant en valeur ce voisinage.
Le site d’Antrain est celui d’une confluence qu’il est assez difficile de ressentir, faute de belvédères ou de façade urbaine en relation avec les rivières. Le site est en outre exposé vers le nord, à contrejour, ce qui ne facilite pas sa perception depuis l’aval de la vallée, occupée par des peupleraies. Tremblay, en revanche, occupe le versant ensoleillé du ruisseau de la Croix-Verte. Le bourg se présente ainsi comme un motif dans le paysage, dont l’horizon est formé par le sommet boisé de Pontavice qui coiffe la butte granitique.